- Marc Boyer
- Guides voiles parapente
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Il y a encore une dizaine d’années, les petits gabarits n’avaient pas beaucoup de choix. Les voiles de petites surfaces volaient moins bien que leurs grandes soeurs et s’avéraient plus délicates lors d’incidents de vol Ces différences, à charge alaire équivalente, se sont beaucoup atténuées et presque tous les constructeurs ont aujourd’hui de très bonnes voiles à proposer aux petits gabarits, en tous cas dans les catégories d’homologation A et B.
Nous ne parlerons pas ici des mini voiles ni des mono surfaces : elles ne sont pas conçues à l’intention des pilotes légers mais pour des pilotes aguerris recherchant surtout plus de vitesse et plus de réactivité. Elles permettront cependant à des pilotes de petit gabarit, ou des enfants, de s’aguerrir en gonflage et pente école en attendant d’atteindre les poids mini des voiles classiques, souvent situés autour de 50 ou 55kg de ptv
Dilemme du choix de la voile
Il y a une première chose à bien comprendre pour faire le choix d’une taille de voile, c’est la différence entre les comportements en bas et en haut de fourchette. Prenons un exemple : vous pesez 55 kg tout nu et une fois équipé votre PTV est d’environ 62 kg. Imaginons que la voile de vos rêves propose une taille XXS dont la fourchette PTV va de 50 à 65 kg et une taille XS qui va de 60 à 75 kg. Laquelle choisir ?
Si vous prenez la plus grande (XS), vous serez en bas de fourchette donc plutôt "sur-toilé", c’est dire que la voile sera un peu grande pour vous. Si vous prenez la plus petite (XXS), vous serez en haut de fourchette, donc plutôt “sous-toilé”, c’est à dire que la voile sera un peu petite pour vous.
- Sur-toilé : vous aurez une voile plus lente en vitesse max et dans ses réactions aérodynamiques, donc peut-être un peu plus tolérante. Mais vous aurez plus de difficulté à la maitriser dans du vent fort au décollage et à l’atterrissage. Enfin, les petites fermetures, notamment en bouts d’aile, seront peut être un peu plus fréquentes.
- Sous-toilé : vous aurez une voile plus rapide, plus vive, plus maniable, donc globalement plus sympa à piloter, mais un peu plus exigeante. En revanche vous serez moins vulnérable quand le vent forcit (puisque vous aurez moins de surface sur la tête) et les fermetures seront plus rares.
Niviuk Koyot 4 (22).
On conseille souvent aux débutants (volant donc sous des voiles EN A) d’être plutôt vers le bas ou en milieu de fourchette pour avoir une voile encore plus facile et plus tolérante. Mais au bout de quelques mois, s’ils ont un pilotage un peu fin, ils risquent de trouver leur voile un peu paresseuse. Ils pourront alors évoluer vers la même voile mais de la taille en dessous : en haut de fourchette, la voile sera plus vivante, plus amusante à piloter, un peu plus rapide et globalement plus sympa. En ce qui nous concerne, à la rédaction de Parapente Mag, nous avons envie de souligner le plaisir, la facilité, l’agilité et la sécurité supplémentaires qu’offre du mat riel petit et léger. En plus d’une voile de surface conventionnelle, nous avons toujours avec nous, chacun une petite voile de 19m2 avec une sellette string, qui tiennent dans un tout petit sac et pèsent une plume (2.2 kg au total). Kti et moi sommes au même poids (55 kg) et nous volons au même ptv (autour de 70 kg). Nous sommes en haut de fourchette de notre petite voile light, laquelle ne nous offre évidemment pas tout à fait le même plané qu’une aile de surface plus adaptée. Mais la différence de plané est bien moins importante qu’on l’imagine: nous avons peut être 8.5 de finesse au lieu de 9... est ce bien grave ? Ce serait peut être gênant dans une optique de performance, mais lorsqu’il s’agit de voler en montagne c’est une merveille. En bord de mer quand le vent forcit, passant de 20 km/h où tout le monde peut voler, à 25 ou 28 km/h où beaucoup préfèrent attendre sagement que les conditions redeviennent plus calmes, nous sortons nos 19m2 et décollons sans avoir à nous battre. En vol nous avons de la vitesse, donc de la défense et de la tranquillité. En haute montagne, nous prenons évidemment toujours nos 19m2 pour leur légèreté dans le sac à la montée et c’est aussi une vraie sécurité supplémentaire lorsque ça souffle un peu fort, que de ne pas gonfler la voile en tremblant, ne pas être le jouet du vent, ne pas craindre de se faire reculer. Nous avons souvent comparé deux surfaces de la même voile. La plus petite nous a toujours offert plus de plaisir et plus de sérénité, ne nous pénalisant que très peu en plané. En ce qui nous concerne, notre religion est faite, c’est haut de fourchette, toujours !
Les conseils de Marc Boyer
Marc Boyer, 55 kg, créateur de Soaring Shop, DTE de l’école Soaring à Luchon et spécialiste des petites voiles lors des vols d’homologation qu’il fait pour le laboratoire Aérotest, connait parfaitement le matériel pour petits gabarits.
Marc quels conseils donnes tu aux petits gabarits pour choisir leur voile ?
D’abord définir leurs objectifs. On ne choisit pas la même voile si l’on vole principalement en bord de mer, en thermique, en distance ou en vol rando. Une aile efficace la fois dans tous ces domaines n’existe pas. Il faut donc se donner des priorités et faire des choix. Concernant la charge alaire, je pense que voler en début ou en fin de fourchette implique de bien connaître son aile et d’adapter son pilotage. En ce qui me concerne, je choisis mon aile selon deux critères essentiels :
- pouvoir voler avec un équipement léger.
- avoir la plus grande marge possible entre le niveau de pilotage qu’exige mon aile et mon niveau de pilotage à moi. Je veux pouvoir contrôler mon aile à100% dans n’importe quelles situations. Avec ces deux critères, je vole le plus souvent avec des ailes EN C. Ensuite je m’adapte aux comportements de mon aile en fonction de ma charge alaire, mais il y a un point sur lequel je ne transige jamais : c’est la maniabilité. Pour moi la maniabilité, la précision en virage et la montée en thermique sont essentiels. Au final, ne pesant que 55 kg, je vole rarement en haut de fourchette mais il existe des ailes très maniables en milieu de fourchette. L’aile la plus surprenante que je connaisse à ce jour est la Gin Explorer : elle offre, en milieu de fourchette, un virage et un taux de montée exceptionnels. On compense facilement la perte de glisse en ligne droite en utilisant systématiquement l’accélérateur
L’amélioration des petites tailles concerne-t-elle les quatre catégories d’homologation ?
Aujourd’hui sur des ailes A, B et même C, les écarts entre petites et grandes surfaces sont moindres et parfois même inexistants. Cependant, plus on monte en gamme et dans les allongements et plus les différences de performances entre grandes et petites tailles sont marquées. Dans les catégories EN C et surtout EN D, les tailles moyennes et grandes sont plus performantes en glisse et finesse bras hauts et accéléré. Les petites tailles ont parfois encore des réactions plus dynamiques, notamment sur des sorties de domaine de vol. Voler en haut de fourchette sur certaines petites voiles peut induire des comportements différents que sur le même modèle en plus grande taille. Sur ce point, il faut s’informer. Sur les montées en thermiques, les petites tailles ne sont souvent pas moins efficaces que les grandes et c’est souvent la charge alaire et la dextérité du pilote qui font la différence.
Et si l’on vole léger sous une petite aile ?
Par vent fort, le pilote sera plus en difficulté au décollage. Son aile perdra en vitesse et en tenue. Les quelques km/h perdus influent sur son rendement aérodynamique, sa cohésion, les tensions générées par son architecture interne : l’aile se déformera un peu plus dans la turbulence et fermera plus facilement. Les 1 ou 2 km/h de vitesse sur trajectoire que l’on perd du fait de voler léger permettent à certaines rafales de franchir le seuil de fermeture. C’est, en partie, pour cette raison que les ailes peu chargées ferment plus facilement. Il faut également savoir que plus l’aile est allongée, plus il faut voler avec une forte charge alaire. C’est une vraie contrainte, surtout pour les petits poids. On sera efficace et performant dans tous les compartiments du vol (taux de chute, finesse, glisse, maniabilité …), avec les ailes ayant entre 4.5 et 5 d’allongement et avec une charge alaire inférieure à 3.4 kg/m2. Ce ne sera plus du tout le cas avec 6 d’allongement. A partir de 6 d’allongement, il faudra voler avec des charges alaire supérieure à 3.5 kg/m2. Enfin, avec des ailes plus de 7 d’allongement, il faut impérativement voler avec des charge alaire d’au moins 4.5 kg/m2... soit des Ptv de 90 kg pour des surface de 20m2 : pour des pilotes qui pèsent au départ 50 kg, l’emport de lest est alors indispensable... avec tous les inconvénients que cela représente.
Alors quoi faire ?
Dans les montées en thermiques, il faudra soigner son pilotage et notamment le contrôle de votre demi aile extérieure devenue plus sensible. Mais en tant léger, vous avez un petit peu plus de débattement à la commande : de quoi récupérer du pilotage et être efficace pour le contrôle. Dans les lignes droites, les transitions, vous pourrez récupérer 3 ou 4 km/h en utilisant le plus souvent possible votre premier barreau qui vous fera ainsi regagner de la finesse, de la glisse et de la stabilité. Grâce à l’accélérateur, vous pourrez compenser le déficit de finesse qui est fréquent sur les petites tailles. Il est donc important de savoir comment votre aile réagit au premier barreau. Est-ce qu’elle retrouve de la tenue, de la cohésion, du rendement ? Est-elle moins sensible aux turbulences, plus résistante ?
Et en compétition ?
Il n’est pas évident d’être parmi les meilleurs sur les montées en thermique, l’analyse du ciel, le choix des lignes, la stratégie, pour ensuite se faire dérouiller dans les transitions par des ailes plus grandes et plus fines. Il y a plein de sports où le gabarit joue un rôle, mais dans ces sports il existe des catégories. En parapente il serait peut être judicieux d’appliquer des coefficients en fonction des tailles de voiles. Facile à dire mais pas facile à faire. En attendant, à un très haut niveau de compétition, les poids légers ont peu de chance de faire des podiums. Quant à l’emport de lest, c’est contraignant et dangereux : des décollages par vent fort avec 30 kg de lest font vraiment prendre des risques aux petits gabarits.
Mcc Arolla 2
Le choix de la sellette ?
On peut l’aborder de la même façon : quel est le programme du pilote ? Soaring, thermique, distance, vol rando ? Quoi qu’il en soit, tous les pilotes ont besoin d’un châssis stable, confortable et offrant du pilotage. On fait parfois l’amalgame entre un châssis qui transmet et un châssis instable. La stabilité d’un châssis est définie par sa capacité à limiter un déséquilibre. Son pilotage est défini par sa capacité à fournir des appuis précis. Les infos que nous adresse notre sellette dépendent de son concept et de sa géométrie. Il est faux de conclure qu’un châssis est instable quand il transmet beaucoup d’infos. Pour revenir aux petits gabarits, les sellettes cuissardes, sans assise rigide, sont souvent une très bonne alternative pour des pilotes ayant un bassin étroit car ils épousent idéalement les formes de leur bassin et de leur dos.
Et pour le secours ?
Je vois fréquemment des pilotes légers équipés d’un parachute vraiment trop grand pour leur poids. Il n’est pas recommandable d’avoir un secours prévu pour un poids maxi de 100 kg quand on vole avec un ptv de 65 kg ! Un parachute fonctionne selon des principes aérodynamiques qui dépendent de la charge alaire. Trop léger sous un parachute, on perd de la vitesse à l’ouverture, le parachute manque de tenue, se déforme dans la turbulence et perd en stabilité pendulaire. Il sera aussi plus difficilement maîtrisable une fois au sol, dans des brises fortes. Il faut choisir son parachute en gardant de la marge par rapport au poids maxi autorisé, mais dans une certaine proportion. L’idéal pour obtenir de bons résultats à la fois en vitesse d’ouverture, en taux de chute et en stabilité est de se placer 20 à 30 % en dessous du poids maxi du parachute. Ce poids est défini lors de l’homologation du parachute tout comme les mesures du taux de chute, qui doit être inférieur à 5,5 m/secondes. Mais il faut savoir que ces mesures sont ramenées (par une formule) au niveau de la mer et à une température de 16°. Si vous volez en montagne, sur une arrivée au sol à 1000 mètres d’altitude, par une température de 25°, vous perdrez environ 20 % de portance. C’est pour cette raison qu’il faut garder de la marge par rapport au poids maxi indiqué sur les parachutes, surtout quand on vole fréquemment en montagne et en altitude.
D’autres recommandations pour les petits gabarits ?
Les ailes de petites tailles qui font moins de 19 m2 offrent moins de plané et moins de glisse que les ailes plus grandes. Par contre, elles sont assez souvent plus maniables, plus précises en virage. Si vous visez des grands parcours, n’oubliez pas que pour voler vite, il faut d’abord monter vite, ne pas louper ses raccrochages. Soyez malin et commencez par soigner vos montées en thermiques ! Vos montées rapides compenseront votre petit déficit de finesse et de glisse. Ensuite, n’hésitez pas à laisser passer les “gros” devant pour vous marquer le ciel et vous donner des infos très utiles sur les bonnes lignes de vol, les raccrochages…
Conclusion ?
Il existe aujourd’hui du matériel performant pour des Ptv autour de 65 kg, En dessous, le choix est encore assez limité. Et il se limite drastiquement dés que l’on aborde des ailes à plus de 6 d’allongement et la catégorie EN C. Mais il est possible aujourd’hui de faire des vols fantastiques avec des ailes d’à peine 19 m2, chose qui n’était pas imaginable il y a encore 5 ou 6 ans. Si vous faites 45 kg, vous devrez sans doute renoncer à la Coupe du Monde mais d’autre aventures vous tendent les bras et le ciel est à vous !
Nos voiles pour les petits gabarits
Voici ce que l’on trouve pour des PTV à partir de 50 et 55 kg, dans les catégories d’homologation A, B et C disponible sur soaringshop.fr
Très peu de voiles EN C et aucune EN D. Mais il faut prendre en compte le fait qu’avec des voiles performantes de type C ou D, on vole généralement avec une sellette cocon assez lourde et un parachute de secours, ce qui permet d’accroître le PTV.
Voiles homologuées EN A, à partir de 50 kg
Voiles homologuées EN A, à partir de 55 kg
Voiles homologuées EN B, à partir de 50 kg
Voiles homologuées EN B, à partir de 55 kg
Voiles homologuées EN C (toutes à partir de 55 kg)
La première aile montagne a été créée en 1996 par Nervures, la Kenya, avec les premiers tissus légers. Aujourd'hui, de nombreuses marques se sont impliquées et se sont véritablement passionnées pour le développement de matériel léger. Voici notre classement des meilleures ailes montagne en 2024.
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