AirDesign est la marque qui a réalisé, au cours de ces dernières années, l'une des plus belles percées sur le marché du parapente. Elle a été créée en 2011 par Stephan Stiegler et Martin Gostner. L'amitié entre ces deux personnages a été le moteur de cette création. Pilote test depuis 1991, champion du monde de distance en 1995, Stephan conçoit des ailes depuis 2000. Martin vole depuis 1986 et baigne dans le parapente depuis son enfance avec une maman monitrice. PDG d'AirDesign, c'est un véritable autodidacte qui a fait ses armes à travers toutes les facettes du parapente : enseignement, couture, production, essais en vol.
Basée dans la petite ville d'Absam, dans le Tyrol autrichien, à 20 minutes d'Innsbruck, AirDesign est une marque internationale également implantée en France et en Chartreuse, à proximité du décollage de Saint Hilaire. Je vais maintenant vous parler de la Livi, un nouveau modèle ultra léger de la gamme, homologué en classe En-B.
J'ai choisi de tester deux tailles : la XXS et la XS. J'ai volé à 72 kg avec la XXS et le cocon AirDesign Sock SL. Avec une surface à plat de 19,33 m², ma charge alaire était de 3,72 kg/m². À 75 kg, sous la taille XS, avec une surface à plat de 21,94 m² et le cocon Gin X-Lite, ma charge alaire était de 3,41 kg/m². J'ai volé une dizaine d'heures avec les deux tailles, notamment sur le site d'Ager pour pouvoir voler en conditions thermiques.
La Livi est livrée dans le sac de pliage maison Air Pack 50/50, un sac de pliage très malin qui permet de ranger son aile en la pliant en deux dans le sens de la corde. Dès que l'on sort l'aile de son sac, on comprend de suite qu'il s'agit d'un produit haut de gamme. La qualité des tissus Dominico, souples et très agréables au toucher, y est directement pour quelque chose. Ces tissus ont été soigneusement testés et éprouvés par AirDesign avant d'être sélectionnés.
On trouve ainsi en extrados du Dominico Dokdo 10DSE 25 g/m², en intrados du Dominico DOKDO-10DSF. Pour des questions de résistance aux efforts et aux déformations, les cloisons sont en Dominico DOKDO-204432FM / Skytex 27 hard. Le grand avantage du Dominico 10D est qu'il offre un poids et une compacité au pliage imbattables tout en étant pratiquement aussi résistant à la déchirure que son grand concurrent, le Skytex 27 Double enduction. Cette impression de qualité se confirme lorsque l'on découvre des élévateurs légers et fins en sangles aramide de 12 mm de large.
On compte 4 brins et une poignée en tissu reliant les B et les C pour optimiser le pilotage aux arrières sur cette aile montée en 3 lignes. Des élévateurs super légers en dyneema, disposant du B/C control, sont disponibles en option et permettent de gagner 200 grammes. Un autre élément marquant est le bord d'attaque qui dispose, au niveau de chaque jonc en Nitinol, d'une pièce en tissu très résistante dont le rôle est de protéger le tissu light des frottements. On rajoute quelques grammes de tissu, mais on préserve ainsi cette partie essentielle de l'aile et on élimine ce point faible.
Le bord d'attaque et son Shark Nose sont obtenus grâce à un judicieux montage en forme de S des joncs en Nitinol. Grâce à ce montage par contrainte, on évite l'utilisation d'un deuxième jonc. Le bord d'attaque gagne ainsi en souplesse et en légèreté. À noter la présence de boucles d'attache au sol pour maintenir en place l'aile sur des terrains raides et glissants. Le suspentage est réalisé en Aramid Edelrid 8001U, entièrement dégainé. Il bénéficie d'un traitement hydrophobe et d'un code couleur pour faciliter la préparation de l'aile. Ce suspentage non gainé, en plus d'être plus fin et de réduire ainsi la traînée, offre à la fois une excellente résistance et durabilité.
La Livi est issue de la Vivo 2, l’aile intermédiaire d'AirDesign en classe En-B. En ayant les mêmes caractéristiques, allongement 5.38 et 49 cellules, la Livi vient compléter la gamme avec une aile très légère, "Superlight construction" destinée aux amateurs de hike and fly. Avec la Livi en taille XXS, on gagne 970 grammes par rapport à la Vivo 2, passant ainsi de 3.73 kg à 2.96 kg. Les écarts de poids entre ces deux voiles varient de 800 à 1000 grammes selon les tailles. En comparant les poids avec l’aile En-B la plus légère du marché, l’Arak Air Skywalk XXS de 21,40 m² pèse 2.9 kg. La Livi XS de 21.94 m² pèse 3.26 kg. Mais chose très intéressante, on trouve sur l’Arak XXS de 21.40 m² les mêmes PTV que sur la Livi XXS de 19.33 m².
Le suspentage est clarifié par le simple fait de séparer les différentes lignes. La souplesse des suspentes et leur code couleur facilitent la tâche. On sera, comme toujours, plus vigilant sur le démêlage des commandes de freins et des parties hautes sur la ligne des "C". Gonfler une Livi est un jeu d'enfant. Sans vent, on peut quand même faire un gonflage face au vent, l’aile acceptant de monter par de simples mouvements de poignet. On est surpris de pouvoir garder l’aile au zénith avec seulement 3 ou 4 km/h de brise. Par vent plus fort, il n’y a pas de tendance à accélérer en fin d’élévation, et de bons déplacements au sol permettront de contrôler facilement le mouvement. La prise en charge est excellente au décollage et donne une idée des performances de l’aile. Si je devais choisir deux mots pour qualifier la Livi au décollage, je dirais : accessibilité et douceur.
En sortie de décollage et en se mettant au "contact" de l’aile, avec 10 à 15 cm de traction, on découvre des commandes assez souples. On a à peine 200 grammes de poids dans les mains. Dans les premiers thermiques et lors du premier virage, il n’y a aucune inertie et la voile répond instantanément à la commande. Elle part facilement en roulis sur les 30 premiers degrés avec des amplitudes moyennes (20 cm) à la commande. On peut la piloter au poignet, d'autant que l'on avalera la garde pour plus de précision. Et même s'il est fortement conseillé de prendre un appui sellette pour déclencher son virage, la Livi part en courbe uniquement à la commande. Pour prendre plus d'angle en virage et réduire son rayon, on pourra augmenter sans risques les amplitudes.
Le débattement à la commande est vraiment très grand et dépasse facilement les 70 cm. On trouve ainsi le point de décrochage bras tendu et il faut attendre plus de 3 secondes avant que ses bouts d’ailes se vident, reculent et partent en décrochage. C’est impossible de se faire surprendre, d'autant que le durcissement des commandes est très net dès qu’on arrive au niveau des hanches. Sur la question de la maniabilité, la Livi m’a vraiment bluffé ! Voler dans les thermiques d'automne à Ager a été un vrai plaisir. C’est un véritable petit vélo, précis, réactif et agile, et je me suis de suite senti à l’aise. La Livi est une aile facile à comprendre. J'ai pu également vérifier ses performances en enroulant dans de petits thermiques en compagnie d’ailes En-C.
Je pense que ce sont dans les petites conditions thermiques que l’on découvre principalement les qualités et le rendement d’une aile en vol thermique. Tout comme ce sont dans ces mêmes conditions que l’on apprend et que l’on affine sa technique. L’aile est très agréable et très efficace en thermique, d’autant que son amortissement en tangage est très bon et que ses bouts d'ailes sont très solides. Dans les spirales, l’aile n’a pas tendance à faire des remises à plat. Les relances sont faciles à faire en utilisant classiquement la commande extérieure. Globalement, la Livi est une aile très rassurante et complètement en phase avec le public de pilotes qu'elle vise. Elle est très proche au niveau de la stabilité d’une En-A. Ainsi, sur des asymétriques massives (+ 50% de l’envergure), l’abattée est faible et l’aile réouvre avant le ¼ de tour de rotation.
Les grandes oreilles ne posent aucun problème. Elles sont faciles à réaliser avec les élévateurs dédiés et restent stables, y compris à fond d'accélérateur. En spirale, l'accélération reste progressive et en phase avec la catégorie de l’aile. Comme à chaque essai de voile, je cherche la neutralité spirale. On trouve de la neutralité spirale comme avec toutes les voiles actuelles. Avec la Livi, on la trouve à partir de 40° d’inclinaison et à la condition de maintenir son appui sellette à l’intérieur du virage. Rien de surprenant, mais je vous le signale quand même car il faut que ces infos soient connues de tous.
Bras haut, je vole à 36-37 km/h. Au premier barreau, j’atteins 40 km/h et au 2ème j'obtiens 44 km/h. Des valeurs qui correspondent aux ailes En-B actuelles. On pourrait être surpris par la vitesse maximale de la Livi, mais ce qui compte avant tout, c’est d’avoir des vitesses exploitables. Qu’une aile puisse voler à 50 km/h ne sert à rien si elle perd en stabilité et en solidité à hautes vitesses, sans parler de son plané.
Avec la XS et ses 22 m² (21,94 m² exactement), je n’ai pas du tout retrouvé ces comportements. Fini la précision et cette agilité qui caractérisent la Livi XXS que j’ai essayée.
Dans les montées en thermique, la voile avait une grosse tendance à se remettre à plat et je n’avais plus du tout la même glisse et le même rendement. J’ai volé plus d’une heure en thermique et j’ai dû adapter mon pilotage pour retrouver de bons placements en thermique et de l’efficacité. Il a fallu travailler sur des amplitudes à la commande plus grandes et des actions plus dynamiques, des choses que je n’ai pas l’habitude de faire. Nous avons tous nos habitudes de pilotage et nous apprécions certains types de voiles et de pilotage. Personnellement, la qualité du virage est le premier critère pour moi, suivie de la glisse et de la tenue de l’aile. Je ne me suis pas trouvé plus efficace en thermique même en étant plus léger et avec un meilleur taux de chute, car je perdais trop de précision en pilotage.
Mais alors, pourquoi les fabricants nous proposent-ils des fourchettes de poids nous faisant voler avec des charges basses ? C'est parce qu'il existe des voiles qui, en bas de la fourchette, restent précises en pilotage. Avec ces voiles peu chargées, on booste ses montées en thermique. On récupère ensuite du rendement et de la glisse en utilisant plus systématiquement son accélérateur.
L’exemple le plus parlant pour moi est la Gin Explorer avec laquelle j’ai volé pendant des années en étant léger. J’étais ultra efficace en thermique et pas trop à la rue en transition. Même constat sur une Arak Air en taille XXS que j’ai volée à une charge alaire de 3.36 et où l’aile était précise, maniable avec une bonne glisse. Il ne faut donc pas faire de généralités et dire qu’il faut voler systématiquement en haut de fourchette, même s'il est complètement vrai de dire que sont assez rares les voiles qui marchent bien en bas de fourchette. La question des gammes de voiles est importante, tout comme le niveau des pilotes, tout comme les habitudes et les attentes du pilote. On ne peut pas avoir le même discours avec des ailes En-A et des ailes plus performantes.
Globalement, les charges alaires augmentent avec les allongements et les tailles de voiles. Plus l’aile est allongée et grande en surface (à l’exemple des biplaces), plus la charge alaire est élevée. Dans ces cas-là, on a besoin de cette charge pour obtenir une bonne tenue de l’aile. On ne donnera pas le même conseil à un débutant et à un pilote expérimenté. Avec un débutant, on chargera son aile de façon à garantir une bonne prise en charge et une bonne stabilité. Être en haut de fourchette ne sera pas forcément le plus judicieux.
Ensuite, nous n’avons pas tous les mêmes attentes par rapport à notre aile. Qu’est-ce que veut le pilote ? De la précision, du rendement, de la glisse, ou plutôt plus de stabilité, d'amortissement, de progressivité en virage ? Ces critères appartiennent à chacun, tout en sachant qu’au final, nous recherchons tous le compromis idéal. On se méfiera donc, comme toujours, des choix extrêmes… Ces fourchettes de poids existent et les poids minimaux sont là aussi pour nous indiquer si l’aile est conforme aux tests à ces PTV. Libre à chacun ensuite de se placer à bon escient dans la fourchette.
Pour revenir à la Livi, une chose est sûre : la taille XS avec un PTV de 75 kg ne correspond pas à ce que j’attends d’une aile, et j’aurais envie de vous conseiller de voler en haut de fourchette avec la Livi pour profiter pleinement de ses qualités. La Livi est un petit vélo qui a besoin non pas de jambes, mais plutôt d’être chargé.
J’ai vraiment apprécié cette Livi. Elle se démarque à plusieurs niveaux. D’abord, son poids : elle fait partie des ailes En-B les plus légères et les plus compactables du marché. Avec un pliage "montagne", j’ai rangé la Livi XXS et mon string dans un sac de 20 litres. Ensuite, elle se distingue par son côté joueur, sa précision en pilotage et sa stabilité générale. Elle est plus proche d’un niveau B low que d’un B middle. Mais peu importe ces considérations toujours discutables, car ce qui compte le plus, c’est le fait qu’elle sera vraiment parfaite pour les pilotes qui volent régulièrement et qui aspirent à la sérénité sur site, en cross, en marche et vol.
"Comme le dit AirDesign : "Au lieu de se concentrer uniquement sur la performance, ils préfèrent produire des jouets". Ce slogan colle tout à fait à la Livi et à l’esprit de cette marque qui, aujourd’hui, fait incontestablement partie des leaders du marché."
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