“Avec un parapente moderne, il est inutile et dangereux de voler en tendant légèrement les freins pour sentir la voile. Tirer un peu les freins (moins de 10 %) casse le profil du parapente et enlève son effet reflex.”

Voilà une affirmation qui ne peut laisser indifférent ! Elle est signée Bruce Goldsmith (ancien champion du monde et concepteur BGD), reproduite et approuvée par Eric Laforge sur son site Asagiri. Parapente Mag a demandé à Luc Armant (concepteur Ozone) et aux pilotes test Cédric Nieddu et Marc Boyer de commenter cette affirmation de Bruce… Voici leurs avis.

L'avis de Luc Armant (concepteur Ozone)

Cette remarque n’est pas vraiment pertinente quand on n'est pas accéléré. En très résumé, je dirais : 

c’est tout à fait vrai quand on vole à l’accélérateur mais ce n’est pas pertinent quand on vole sans accélérateur et que le pilote a un pilotage dynamique. 

Oui, tirer un peu les freins change complètement le coefficient de moment du profil. C’est un problème en vol accéléré car cela se traduit par une diminution de la tension dans les suspentes avant, alors que c’est cette tension qui permet à la voile de ne pas se faire entrainer en fermeture par la trainée de ces mêmes suspentes. Je sais que la très grande majorité des pilotes et même des constructeurs ne comprennent pas ce point : il mériterait un développement détaillé avec des dessins et des chiffres. En tant que salarié travaillant pour une marque en milieu concurrentiel, cette ignorance m’arrange ! Mais en tant que pilote de la communauté, ça me contrarie.

En vol lent

En vol lent ce n’est pas un problème car la traînée propre des suspentes A n’est plus vraiment déterminante pour créer une fermeture. En vol lent, la fermeture est créée par une déformation de la structure, une sous-incidence (voire même une incidence négative). En vol lent, l’amortissement en tangage est de toutes façon assez faible quel que soit le coefficient de moment du profil pratiqué par les marques de parapente. Ce qui est déterminant en vol lent, c’est la capacité du pilote à sentir les actions qu’il doit mener aux commandes pour amortir le tangage et prévenir les fermetures. Les commandes peuvent être les B ou les freins. En vol lent dans des conditions très turbulentes, l’action du pilote est nécessaire. Sans action, c’est la fermeture assurée.

En vol turbulent

En vol très turbulent proche du relief, les meilleurs pilotes volant sous les modèles 2 lignes Ozone, et qui ont pourtant le choix d’utiliser les commandes d’élévateur arrière sur leur 2 lignes vont préférer utiliser les commandes de freins. La raison, c’est que les commandes de freins permettent une plus grande capacité de contrôle de la vitesse et un plus puissant freinage du tangage (par création de traînée. 

Conclusion

En conclusion, je dirais que cette citation de Bruce est pertinente à condition d'ajouter : tirer un peu les freins et garder cette position statique quoi qu’il arrive est contre-productif pour la stabilité du parapente en vol lent, et encore plus en vol accéléré. En pratique, avec un pilote un peu expérimenté, cette position peut permettre de sentir ce qui se passe au niveau de la voile au travers de la tension dans les freins et de pouvoir agir en conséquence par un pilotage dynamique.

L'avis de Marc Boyer (pilote test)

Les remarques de Bruce et Eric sont fondées mais elles méritent d’être affinées car elles ne peuvent pas s’appliquer à tous les pilotes et à toutes les catégories de voiles. Il faut tenir compte du niveau du pilote et du type de voile, chacune ayant un profil avec un effet reflex plus ou moins marqué. Il a été dit beaucoup (trop) de choses à propos des profils reflex. L’effet reflex d’un profil définit sa capacité à amortir un mouvement de tangage induit par certains types de rafales (diminution brutale de l’angle d’incidence). Il se quantifie à travers un coefficient de moment du profil en question. Lors d’une abattée, c’est le déplacement du centre de poussée vers l’avant, à l'intérieur du foyer de portance, qui amortit le mouvement. Luc pourrait faire un petit exposé là-dessus, mais là n’est pas la question.

Les pilotes veulent savoir ce qu’il faut faire quand on se fait brasser. On peut toucher ses commandes ou pas.

Niveau de pilotage et niveau de voile

En fonction de leur catégorie de A à D, les ailes n’ont pas les mêmes profils ni les mêmes effets reflex. Quand on monte en gamme, on trouve généralement des voiles avec des effets reflex plus marqués, mais il n’y a rien de systématique et on ne peut pas généraliser. Sur les ailes de catégorie A ou B, ce que l’on recherche, s’est avant tout de la stabilité et de la tolérance dans le pilotage à la commande. Les pilotes en progression doivent apprendre à anticiper sur les mouvements de leur voile. La position du “contact” (à travers les commandes) permet de créer un lien tacite entre le pilote et sa voile. On applique alors une certaine quantité de frein en conditions turbulentes qui permet de ressentir des variations de poids (allégement) qui préviennent les départs en tangage. Cette quantité de frein varie selon les catégories. En simplifiant au maximum pour donner des repères, on peut se risquer à dire : 

  • Avec une EN-A et une EN-B, cette position du contact correspond à 10% du débattement soit environ 10 cm de volet.
  • Avec une EN-B+ et une EN-C, on est entre 5% et 10%, soit environ 5 cm de volet.

Ces quantités de frein appliquées sur ces voiles de niveau A et B ne les fragilisent pas pour autant.

  • Avec une EN-D ou une CCC, il n’est plus question de mettre du contact.

Cela s’explique par le fait qu’en ralentissant une aile à plus de 7 d'allongement de quelques km/h, celle-ci perd trop de tenue, se déforme dans la turbulence et perd énormément en maniabilité.

Les pilotes utilisant ce type de voile n’ont plus besoin de ce lien tactile.

En effet, cette position de “contact” disparaît au fur et à mesure de la progression du pilote, et au fur et à mesure que l’on monte dans les gammes de voiles. En progressant, le pilote peut se passer de ce lien tactile (le contact) parce qu'il est capable de ressentir et d’anticiper sur les mouvements de sa voile grâce notamment à des sensations d’équilibre très développées.

En vol accéléré

En vol accéléré, il est évident que l’on ne doit pas appliquer de frein, ce qui serait complètement contre productif. En vol accéléré, on cherche à optimiser le plané et la glisse de son aile. La capacité d’un profil à amortir les départs en tangage induits par une diminution brutale de son angle d’incidence, dépend de l’efficacité de son effet reflex. En transition, on est constamment amené à se poser la question suivante : je laisse faire, je reste bras hauts et l’effet reflex fera le job, ou je reprends le contrôle (aux “B” ou aux commandes). Pour contrôler une abattée, on a plusieurs options :

  • Piloter aux “B” tout en restant accéléré
  • Relâcher l’accélérateur
  • Ou relâcher son accélérateur et reprendre le contrôle de son aile aux commandes ou aux “B”

Les remarques de Bruce et d’Éric, même si elles manquent de précision, sont très intéressantes car elles sont bien la preuve que nos ailes ont évolué et continuent d’évoluer constamment. Il faut donc faire évoluer notre pilotage et la formation des pilotes. Je trouve que le pilotage aux B mériterait d’être appris aux pilotes dès qu’ils passent sous une aile B+. Mais il faut se méfier des généralités qui ne reflètent pas la variété qu’offrent les parapentes. La difficulté pour les pilotes est de connaître et de comprendre le fonctionnement de leur aile.

Les stages SIV peuvent être un moyen de découvrir les comportements de son aile, mais rien ne remplacera jamais la “vraie vie” et le vol en thermique. À ce titre, lors des manœuvres faites en SIV, il est essentiel de distinguer les différentes sortes d’abattées auxquelles on peut être confronté : pendulaire et/ou  aérodynamique. Quand on voit des pilotes en SIV, sur le point de tomber dans leur voile, c’est souvent sur des abattées pendulaires et aérodynamiques. Cela n’a rien à voir avec les abattées auxquelles nous sommes confrontés en conditions turbulentes et en thermique.

Ndlr. En complément de la citation de Bruce, Eric Laforge ajoutait ceci :

"En stage SIV, on doit avoir soit les mains tout en haut (pas de freins du tout), soit les freins tirés très bas. Les freins tout en bas, c’est pour stopper une abattée ou pour faire un décrochage. Les freins tout en haut, c’est pour que le parapente puisse reprendre son vol. Le problème c’est que si l'on ne remonte pas complètement les mains, si l’on tire encore légèrement les freins, cela fait l’opposé de l’effet reflex et le parapente shoote plus fort. C’est ce que l’on voit dans les vidéos où le parapente plonge et le pilote tombe presque dans la voile. C’est le plus souvent parce que le pilote garde les freins légèrement tirés. Ce petit volet de freinage rend le profil plus instable en tangage et le fait plonger plus. Cela s’applique aussi au vol thermique et au vol de distance. On doit donc s'efforcer de voler bras hauts le plus possible. On utilise les freins pour contrôler le tangage bien sûr, mais pour un instant seulement avant de revenir rapidement à la position bras hauts (pas de freins du tout).

Ce qui est trompeur, c'est que tout cela n’était pas vrai avant ! Parce que les vieux parapentes avaient des suspentes beaucoup plus nombreuses, et plus épaisses. Les caractéristiques du profil n’étaient donc pas déterminantes car l’énorme trainée créée par les nombreuses grosses suspentes amortissait la voile. On pouvait donc voler avec les freins un peu tirés pour mieux flotter dans la masse d’air. Mais aujourd'hui, avec la faible trainée des suspentages très réduits et les profils bien plus efficaces, il faut absolument laisser voler le parapente, plutôt que de vouloir flotter avec les freins aux épaules. Tendre légèrement les freins rend le parapente instable en tangage ce qui provoque plus de fermetures, alors que l’idée de départ était de les diminuer. Donc c’est soit bras hauts, soit plus de 10 % de freins !"

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